Datée de 1624, cette grande toile appartient à la première partie de la carrière de Jacopo Vignali, peintre florentin

Jacopo Vignali
Né en 1592 à Pratovecchio, petite commune toscane, Vignali se forme dans l’atelier du peintre florentin Matteo Rosselli. Il réside ensuite à Rome de 1617 à 1619 avant de s’installer définitivement à Florence. Peintre renommé, il travaille pour de nombreux ordres religieux et des florentins fortunés comme le cardinal Léon de Médicis. Son style se caractérise par une riche palette chromatique et par un grand sens du modelé qui donne naissance à de puissantes figures. Il décède en 1664.

Jacopo Vignali représente un épisode de l’Ancien Testament, Abraham servant les anges. Ce récit du chapitre 18 de la Genèse relate l’apparition de trois anges venus annoncer au patriarche, après qu’il leur a offert le couvert, la future naissance de son fils. Son épouse, Sarah, située dans l’encadrement de la porte, trop âgée pour enfanter, esquisse un sourire moqueur en réaction à cette prédiction. Un an plus tard, un enfant naît de l’union d’Abraham et de Sarah et sera prénommé Isaac, en hébreu « il rira », en référence aux rires de sa mère. Cette scène de L’Ancien Testament est considérée comme un symbole de la Sainte Trinité. Elle a souvent été représentée, dès la période paléochrétienne, et les orthodoxes en ont fait une image emblématique, vénérée entre toutes. Malgré son iconographie, ce tableau n’était sans doute pas destiné à un édifice religieux mais à servir d’œuvre décorative.
La nature morte
Jacopo Vignali accorde un soin particulier aux éléments de nature morte de son tableau. Il fait ainsi preuve de virtuosité pour évoquer les délicats reflets des liquides contenus dans les verres que porte Abraham. De même, au premier plan, l’artiste représente avec un soin marqué les sièges, particulièrement ornés, à pattes de lion, où sont assis les anges et l’aiguière et le bassin dorés ; objets ayant servis à laver les pieds des anges avant le repas.
D’après l’historien Sebastiano Benedetto Bartolozzi, auteur d’une biographie de Vignali parue en 1753, le célèbre astronome florentin Galileo Galilée commande en 1624 au peintre une œuvre représentant Abraham et les anges. Longtemps disparue, la peinture, signée et datée en partie basse, réapparaît en 1947 lors d’une vente aux enchères parisienne où elle est acquise par le musée du Louvre qui la dépose au musée Crozatier. Certains ont pu voir dans la représentation d’Abraham un portrait du savant florentin et dans la sphère décorant la balustrade, une référence à ses théories d’astronomie. Néanmoins, aucun document d’archive ne vient appuyer cette hypothèse.
Galilée possède également une imposante collection d’art, dont faisait partie l’œuvre du musée Crozatier, mais dont la composition reste cependant encore à étudier.
La peinture à Florence au début du 17e siècle
Si Florence est un centre important de la peinture italienne au 15e siècle (Botticelli, Fra Angelico, Léonard de Vinci…) et au 16e siècle (Michel-Ange, Rosso Fiorentino, Vasari…), au 17e siècle elle est définitivement supplantée par Rome, Bologne ou encore Naples. À l’exception d’Orazio Gentileschi et de Pierre de Cortone, rares sont les artistes originaires de Toscane à s’imposer à l’échelle italienne et européenne. Ceux-ci effectuent en outre l’essentiel de leur carrière ailleurs. À Florence, il ne demeure ainsi que des artistes qui comme Jacopo Vignali ne sont pas dénués de talent mais dont le travail ne connaît qu’un écho local.