Le reliquaire de Chamalières

Un reliquaire architecturé

Le reliquaire présente un répertoire décoratif relevant de l’architecture avec un crénelage discret, quatre petites tourelles d’angles, des parois décorées d’un motif de parement gravé. Il est surmonté d’un toit à quatre rampants curvilignes, sommé d’un crucifix à la croix écotée (c’est-à-dire d’une croix formée de branches d’arbre dont les rameaux sont coupés). Un écusson en cuivre émaillé aux armes des Polignac, d’argent à trois fasces de gueules, est fixé sur l’un des rampants du toit. Une porte à charnière ouvrant sur le petit côté gauche se verrouille grâce à une goupille suspendue à une chaînette formée de maillons de type jaseron.

Une des deux plaques de corne

À l’origine, les ouvertures étaient garnies de plaques de corne blonde. Par la suite, elles ont été remplacées par du cristal de roche taillé pour mieux voir la relique. Les plaques originelles ont heureusement été conservées.

 

L’abbé Régis Pontvianne (1856-1926), prêtre du diocèse du Puy et passionné d’histoire locale, relate ainsi le don du reliquaire par le seigneur de Polignac :
« C’était le 1er juin 1481. Le Vicomte de Polignac, ayant nom Claude-Armand, chevauchait aux abords de Chamalières porté par une mule superbe, mais aveugle. Comme la conversation qu’il entretenait avec les gens de sa suite roulait sur le pouvoir miraculeux du Saint Clou, conservé dans le couvent dont les constructions émergeaient des saulées du rivage de la Loire, le Vicomte fut surpris par une tentation d’incrédulité ; il s’écria avec un accent de raillerie qui frappa vivement ses auditeurs  » Si cette relique a tant de vertu, qu’elle rende la vue à ma mule et j’y aurai foi. « 
Cette dernière parole était à peine sortie de sa bouche, que la mule montrait par son attitude plus fière et sa démarche plus assurée qu’elle avait recouvré la vue. Mais le Vicomte baisse la tête, balbutie, il a été frappé subitement de cécité. Humilié, vaincu, il reconnaît publiquement son impiété. On le conduit sur le champ à l’église du couvent ; il s’y prosterne devant la sainte relique, confessant sa faute avec larmes et paroles de grande repentance, et promettant, s’il guérissait, un beau reliquaire qui conserverait le Saint Clou et attesterait le miracle opéré en sa personne. Le miracle se fit et le Vicomte tint parole, la mule était retombée dans son aveuglement. »

Église de Chamalières avant les restaurations, gravure in Noël Thiollier, L’Église de Chamalières-sur-Loire, 1901

Monseigneur de Bonald (1787-1870), évêque du Puy de 1823 à 1839, fait enlever la relique qui est alors conservée dans le trésor de la cathédrale du Puy. L’histoire du reliquaire présente alors une zone d’ombre car nous ignorons comment il se retrouve à la fin du XIXe siècle dans la collection d’Édouard Aynard (1837-1913), grand banquier lyonnais, amateur d’art et mécène. Son importante collection est vendue en 1913 à Drouot. Le reliquaire passe ensuite entre les mains de plusieurs collectionneurs à Paris, Genève, Londres… En 2005, lors d’une vente chez Sotheby’s à Londres, le musée Crozatier tente de l’acquérir mais c’est un collectionneur hollandais qui remporte les enchères.

Une inscription court tout autour de la plaque en cristal de la face principale et se poursuit sur le revers : « L’an mil iiii. iiii. vii et le 1. iour de iung le/ p[rese]nt reliquiar e aeste d[on]ne au sai[nt] clavel de chamalieres par hault et puis/sant senior mo[n]s[ieur] claude/armant viscomte de polignac » soit « « L’an 1487 et le 1er jour de juin, le présent reliquaire a été donné au saint Clou de Chamalières par haut et puissant seigneur Claude-Armand, vicomte de Polignac. »

Détail d’une partie de l’inscription

Claude-Armand de Polignac
Cette œuvre a été commandée par le vicomte Claude-Armand de Polignac (vers 1450-1509) en 1487. Il est un des membres de la puissante famille de Polignac qui a marqué le Velay par son influence politique et son mécénat artistique.

Armes des Polignac, d’argent à trois fasces de gueules.

À la fin du XIIIe siècle, la renommée de l’orfèvrerie du Puy et la réputation de ses gemmes (saphirs, grenats, péridots…) sont déjà bien établies. Les très nombreux pèlerins qui honorent la Vierge noire mais aussi les membres de l’aristocratie et les dignitaires religieux forment une clientèle importante. Les maîtres-orfèvres se groupent autour de la cathédrale Notre-Dame et vendent leurs marchandises sur des tables dont les emplacements sont très recherchés. En 1408, 49 maîtres-orfèvres sont répertoriés. Ces artisans sont riches, possèdent des terres et des maisons et accèdent souvent aux charges de bailli ou de consul. Lors de sa venue au Puy, en 1475, le roi Louis XI leur commande une niche en argent doré (la chadaraïta) pour la Vierge noire.

Les poinçons
Deux poinçons sont apposés sous la sole et sur la porte du reliquaire. Celui des orfèvres du Puy présente le mot « PUY » surmonté d’une couronne, celui du maître orfèvre peut être lu « BC ». À ces initiales correspondent plusieurs orfèvres connus au Puy à la fin du XVe siècle : Bernard Cayret, Blaise Clément, Barthélémy Crouzet et Barthélémy Cimentère.

Détail des poinçons.

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